Après toutes ces années à se battre, à tenter de trouver un moyen de vaincre le Seigneur des Ténèbres, Regulus avait besoin de calme. Une sérénité que la ville d’Everton lui avait offerte, à sa manière, auprès de Lily et James. Bien sûr, Harry n’était pas là, et il leur manquait à tous les trois terriblement. Mais sa famille n’était plus constamment en danger, et ça, c’était un vrai changement. Un changement bienvenu, même.

Dans ce contexte, le jeune homme s’était projeté autrement, et il s’était ainsi demandé ce qu’il voulait faire de sa vie. Le sujet était vaste, bien sûr, alors il avait commencé par un premier élément : trouver un métier.

Il n’avait pas eu à chercher longtemps : il avait besoin de conserver ce calme nouveau et quel endroit plus calme qu’une bibliothèque ? L’ambiance feutrée du bâtiment lui correspondait à merveille, et puis il adorait les livres. Que demander de plus ? L’employeur n’avait pas non plus rechigné en constatant ses compétences, et l’avait engagé. Il fallait juste qu’il s’habitue à travailler au milieu de tous ces moldus… Quelque chose, dans son ventre, au fond, tout au fond, protestait, remuait. La haine était si bien ancrée dans ses racines.

A cette heure-ci, de nombreux étudiants venaient profiter des tables et des ouvrages, et Regulus ne fut pas surpris de voir une jeune fille s’arrêter dans le rayon où il rangeait quelques livres, concernant la mécanique automobile, pour mieux observer et trouver une place libre. Celles-ci commençaient à se faire rares…

Il fut cependant plus étonné en la voyant lâcher l’intégralité de ses affaires quand elle l’aperçut, et encore un peu plus lorsqu’elle l’appela “Tonton”.

Tonton ?!

Son premier réflexe fut de se retourner, mais non, il n’y avait personne derrière lui, c’était bien à lui qu’elle s’adressait, ou alors elle avait des hallucinations. Pourtant, il n’avait aucune idée de qui elle pouvait bien être. Il haussa un sourcil circonspect puis s’approcha et s’accroupit pour l’aider à ramasser ses fournitures.

« Je peux vous aider pour autre chose, mademoiselle ? » demanda-t-il en lui tendant une pile de cahiers.

Autant faire comme s’il n’avait rien entendu ; elle s’était sans doute trompée ou essayait juste d’attirer l’attention. Pourtant, lorsqu’il la regarda attentivement… N’avait-elle pas des airs de famille avec… Non, c’était pas impossible. Pas lui. Pas Sirius. Il était beaucoup trop irresponsable pour…

Justement, fit une petite voix dans ses pensées.

Et puis, c’était bien lui à qui on avait confié Harry, après tout. Il était toujours plus responsable que Regulus qui s’était enfui comme un lâche…

Regulus avait beau avoir progressé en termes de relations humaines auprès de James et Lily, il n’était toujours pas à même de gérer les situations les plus délicates avec d’autres personnes que celles qui lui étaient le plus proches. Il se trouva donc un peu démuni et surtout paniqué lorsque la jeune fille commença à se mettre à pleurer au lieu de récupérer le tas de cahiers qu’il lui tendait.

D’accord, il avait touché une corde sensible. Pourtant il n’avait pas été insultant, si ?! Il lui avait justement demandé comment il pouvait l’aider, et il n’avait fait aucune réflexion sur ses affaires étalées sur le sol. Comment était-il censé gérer une telle crise ?!

« D’accord, d’accord, calme-toi s’il te plaît… » commença-t-il en déposa la pile de fournitures à ses pieds.

Le tutoiement était déjà une bonne base pour faire preuve d’un peu de familiarité, et c’était ce dont elle semblait avoir besoin, en tout c’était ce qu’il supposait. Il avait déjà si peu d’expérience avec les enfants - Harry était si jeune lorsqu’il l’avait quitté - alors avec les adolescents… Dans son travail de bibliothécaire, il s’efforçait d’avoir le moins d’interactions possibles avec eux.

« Soraya, c’est ça ? Je vois bien que tu me connais, mais moi, je ne te connais pas. » tenta-t-il avec le plus de pédagogie possible dans son ton.

Bon, ce n’était peut-être pas le meilleur angle possible… Elle était capable de repartir de plus belle s’il insistait sur le fait que pour l’instant elle n’était personne pour lui.

« Mais on va arranger ça ! reprit-il précipitamment. Veux-tu venir boire quelque chose de chaud dans mon bureau et m’expliquer tout ça ? »

Regulus croisait les doigts pour que ce soit suffisant pour apaiser ses larmes, sinon il n’avait aucune idée de comment faire.